On entend souvent que le chauffage électrique coûte une fortune et que ce n’est « pas rentable ». Dans l’imaginaire collectif, qui dit grille-pain dit facture qui explose. Pourtant, l’hiver dernier, j’ai dépensé environ 75 € de chauffage pour toute la saison, soit moins de 20 € par mois. Et je n’ai pas fait ça avec une installation high-tech à plusieurs milliers d’euros. J’ai simplement utilisé un petit chauffage électrique de salle de bain, le truc le plus basique qui soit : une résistance et un ventilateur qui souffle de l’air chaud.

Dans cet article, je vous explique comment c’est possible, dans quel contexte ça marche, et surtout ce qui compte vraiment si vous voulez réduire votre facture de chauffage sans vivre à 13 °C avec trois pulls sur le dos.

Je n’ai pas un chauffage « magique »

Mon chauffage est un petit chauffage électrique que j’ai trouvé chez Weldom pour moins de 50€.

C’est un radiateur électrique soufflant qui est souvent utilisé dans les salles de bain pour rapidement réchauffer la pièce quand on va prendre sa douche. J’ai choisi ce modèle pour plusieurs raisons : Déjà il est peu cher, et si vous avez regardé ma vidéo sur Comment choisir le meilleure chauffage électrique, vous savez déjà qu’un radiateur cher n’est pas du tout synonyme de chauffage plus performant.

Il est léger, ce qui est pratique pour le mettre au garage toute la période de l’année où je ne chauffe pas, il prend peu de place dans ma maison et je peux régler une température de consigne facilement pour avoir une température de confort constante dans ma maison. Bref, je ne me suis pas ruiné sans faire de concession sur ce que j’avais besoin. Mais voyons alors comment je peux avoir une facture si basse d’électricité avec uniquement ce petit chauffage électrique basique.

Le contexte : une petite maison, mais un vrai confort

Ma maison fait à peu près l’équivalent de 50 m² au sol. Ce n’est pas un château, mais ce n’est pas non plus une tiny house. Et surtout, je ne vis pas dans le froid. L’hiver, je suis généralement entre 19 et 20 °C à l’intérieur. Je passe mes journées en tee-shirt et souvent en short quand je travaille à la maison.

L’idée n’est donc pas de se dire : « je paie peu de chauffage parce que j’accepte d’avoir froid ». L’idée, c’est d’avoir un confort correct, mais dans une maison qui a été pensée dès le départ pour avoir besoin de très peu de chauffage.

Le bioclimatisme : utiliser gratuitement le soleil

La première grosse raison qui explique ma faible consommation de chauffage, c’est le bioclimatisme. Dit simplement, le bioclimatisme, c’est le fait de prendre en compte l’environnement dès la conception de la maison pour limiter les besoins de chauffage en hiver et de climatisation en été.

Le soleil apporte environ 1 000 watts par mètre carré. Cette puissance est la même en été et en hiver. Ce qui change, c’est la durée d’ensoleillement et la météo. En hiver, il fait plus froid dehors, mais quand le ciel est dégagé, le soleil continue à envoyer la même quantité d’énergie. L’idée, c’est donc d’arriver à récupérer une partie de cette énergie gratuite pour chauffer la maison.

Dans mon cas, quasiment toutes les grandes ouvertures sont orientées au sud. Au rez-de-chaussée, j’ai une grande baie vitrée et une autre fenêtre au sud. À l’étage, pareil. En hiver, le soleil est bas dans le ciel. Ses rayons rentrent profondément dans la maison, réchauffent le sol, les murs, les meubles, et participent fortement au chauffage. C’est exactement le même principe que l’effet de serre dans une voiture laissée au soleil.

Mes ouvertures pleins SUD

On se dit souvent que ça va transformer la maison en four l’été. En réalité, c’est surtout l’est et l’ouest qui posent problème en période de chaleur, parce que le soleil est bas le matin et le soir et tape directement sur ces façades-là. Au sud, l’été, le soleil est haut, les rayons rentrent beaucoup moins dans la maison. Avec de bons débords de toit ou un peu de végétation, on peut assez facilement limiter la surchauffe.

On voit que l’été, c’est surtout les ouvertures orientés EST et OUEST qui apportent de la chaleur

Le bioclimatisme ne se résume pas aux vitrages au sud. On peut aussi jouer avec la végétation, les vents dominants, les zones d’ombre, les arbres qui protègent l’été mais laissent passer le soleil l’hiver, etc. Dans mon cas, les apports solaires passifs jouent déjà un rôle énorme sur le confort et sur la facture.


L’isolation et l’inertie thermique : garder la chaleur plus longtemps

La deuxième raison, plus évidente, c’est l’isolation. Tout le monde a en tête l’idée que « mieux c’est isolé, moins on a besoin de chauffer ». Mais on réduit souvent l’isolation à une simple épaisseur d’isolant et à un coefficient thermique. C’est important, mais ce n’est pas suffisant.

Un paramètre que je trouve essentiel, et qui n’est pas assez pris en compte, c’est l’inertie thermique, qu’on appelle aussi déphasage. L’idée, c’est de savoir si un matériau est capable d’emmagasiner une partie de la chaleur, puis de la restituer doucement dans le temps, un peu comme une bouillotte.

Si vous remplissez une bouillotte avec de l’eau très chaude, elle va mettre un certain temps à se refroidir. Pendant ce temps, elle diffuse de la chaleur. Si on remplace l’eau par un autre matériau, plus dense par exemple, la même quantité d’énergie pourra être restituée sur une durée plus longue. Plus un matériau est lourd, plus il peut généralement stocker de chaleur et la rendre progressivement. À l’inverse, un matériau très léger, comme le polystyrène, isole très bien, mais n’a quasiment aucune inertie. Il laisse très peu de chaleur sortir, mais il ne stocke rien non plus.

https://www.youtube.com/watch?v=SgvtVaR0RKE
J’aborde toutes ces notions dans une vidéo explicative sur Youtube

Cela fait une différence énorme en pratique. Dans une maison isolée uniquement au polystyrène, dès qu’on coupe le chauffage ou qu’on ouvre la fenêtre, l’air chaud s’en va très vite. Les murs, les plafonds et le sol n’ont presque pas accumulé de chaleur, donc l’air ne se réchauffe pas au contact des surfaces. Il faut rallumer le chauffage pour tout remonter.

Dans ma maison, j’ai choisi de la laine de bois, qui a une très bonne inertie. Quand je chauffe, je ne réchauffe pas seulement l’air, mais aussi les parois. Quand je coupe le chauffage, la température descend très lentement. Quand j’aère, l’air frais qui rentre se réchauffe au contact des murs, du sol et du plafond. Résultat : je n’ai pas besoin de rallumer le chauffage toutes les cinq minutes.

Concrètement, mon petit chauffage est programmé pour fonctionner de 7 h à 22 h si la température descend sous 19 °C. À 22 h, il s’arrête, et le matin, je suis encore autour de 18 °C. Je ne me lève pas dans une maison glaciale, je n’ai pas besoin de lancer le chauffage à 4 h du matin pour avoir 19 °C à 7 h. C’est plus confortable et plus économique.

On peut aussi gagner en inertie en jouant sur la conception des murs. Une isolation par l’extérieur, par exemple, permet de garder la masse des murs à l’intérieur de l’enveloppe isolée. Ils peuvent alors jouer le rôle de « bouillotte géante » pour la maison.


L’étanchéité à l’air : arrêter de chauffer dehors

Le troisième point qui joue énormément, c’est l’étanchéité à l’air. L’idée est simple : si une maison laisse passer l’air un peu partout, l’air chaud s’échappe par les fuites, l’air froid rentre par d’autres endroits, et on passe son temps à compenser en chauffant.

Une fuite d’air, ce n’est pas spectaculaire. C’est un petit filet qu’on ne voit pas. Mais comme un robinet qui goutte, sur une journée, une semaine, un hiver entier, cela finit par représenter un volume énorme de chaleur perdue.

C’est pour ça qu’on met en place des freins-vapeur et des membranes d’étanchéité à l’air derrière les parois. L’objectif est d’éviter les courants d’air parasites. Une maison étanche à l’air ne veut pas dire qu’on ne renouvelle pas l’air, au contraire. Il faut juste le faire correctement.

On voit ici la pose du frein-vapeur, une membrane perméable à l’air, mais pas à l’humidité.

Si on rend une maison très étanche, on doit gérer deux choses : le renouvellement de l’air et l’humidité. On peut le faire à la main en aérant régulièrement, comme je le fais aujourd’hui, ou avec un système de ventilation mécanique (VMC). Les VMC double flux, en particulier, permettent de récupérer une partie de la chaleur de l’air sortant pour préchauffer l’air entrant. On renouvelle l’air sans perdre autant de calories.

Pour l’humidité, il faut réfléchir à la composition des parois pour que la vapeur d’eau puisse traverser les matériaux sans créer de dégâts, tout en gardant l’air où on veut. C’est un sujet technique à part entière, mais l’idée importante, c’est que l’étanchéité à l’air ne veut pas dire maison hermétique et malsaine. Bien pensée, elle permet justement de maîtriser les échanges plutôt que de les subir.

Tout le monde ne peut pas faire pareil… mais on peut s’en inspirer

Je suis conscient que tout le monde ne peut pas décider demain de tourner toute sa maison vers le sud, de changer tous ses matériaux d’isolation ou de refaire entièrement l’étanchéité à l’air. En rénovation, beaucoup de paramètres sont figés. En neuf, par contre, c’est vraiment dommage de ne pas se pencher sérieusement sur ces sujets dès la conception.

Ce que je trouve intéressant, c’est de montrer le résultat après plusieurs hivers. On a passé des heures à réfléchir à la conception, on a galéré sur l’étanchéité à l’air, on a choisi certains matériaux plutôt que d’autres, et aujourd’hui je peux mesurer concrètement ce que ça donne sur ma facture de chauffage et sur mon confort.

Dans mon cas, ça donne une maison d’environ 50 m², chauffée à 19–20 °C, pour moins de 500 kWh de chauffage sur l’hiver, soit environ 75 €. Avec un simple petit chauffage électrique d’entrée de gamme.

Et chez vous ?

Je suis toujours curieux de savoir comment ça se passe dans les autres maisons. Combien vous dépensez en chauffage, avec quelle surface, quel type d’isolant, quelles ouvertures, et ce que vous ressentez comme points faibles : isolation, conception, fuites d’air, orientation, etc.

Si le sujet vous intéresse, j’ai déjà fait des vidéos dédiées à l’isolation, à l’inertie thermique et à l’étanchéité à l’air. Je mets les liens sous l’article. Et si vous êtes en train de concevoir une maison ou de rénover, ça vaut vraiment le coup de se poser la question : « Est-ce que je mets mon budget dans des radiateurs sophistiqués, ou est-ce que je le mets dans une maison qui a besoin de très peu de radiateurs ? »