Parfois, la loi nous oblige tous à être un peu écolo, mais parfois c’est malheureusement l’inverse, elle nous empêche d’agir pour le bien de la planète…

L’assainissement d’une maison

Lorsque nous avons débuté la recherche d’un terrain pour notre projet, nous nous sommes très vite aperçus que ceux qui nous intéressaient avaient systématiquement dans leur description « assainissement autonome à prévoir ». Concrètement, ça veut dire qu’il faut prévoir un système propre à la maison pour s’occuper des eaux usées (l’eau de la douche, des toilettes, de la cuisine…) Quand vous êtes proches d’une ville, généralement il y’a le tout à l’égout, c’est-à-dire que vos eaux usées sont récupérées par la ville qui s’occupe de les traiter. Mais comme nous cherchions un terrain plutôt isolé, cet assainissement collectif ne semblait pas nous concerner.

Nous nous sommes donc assez tôt poser la question de l’assainissement individuel. Les deux possibilités qui reviennent le plus souvent, c’est « fosse septique » et « microstation d’épuration » mais en cherchant un peu, on a découvert une autre solution : la phytoépuration. Bien moins connu que les deux autres, le principe repose sur le traitement par des plantes des eaux usées pour débarrasser l’eau de tous les composants nocifs pour l’environnement.

phytoépuration

La phytoépuration

La solution nous a tout de suite plu, surtout qu’elle peut être totalement autoconstruite (pas besoin de grosse cuve, de pompe spécifique ou autre), c’est « simplement » un système de plusieurs bassins en cascades plantés avec des plantes spécifiques.

L’idée de gérer nous-mêmes nos eaux usées correspondait tout à fait à nos objectifs d’autonomie et cela est bien mieux pour la planète plutôt que d’utiliser le système d’assainissement collectif (le tout à l’égout) qui consomme de l’électricité et utilise des produits chimiques (mais peut être pas tant que ça ?).

Sauf que lorsque nous avons finalement trouvé le terrain de nos rêves, nous avons appris que le tout à l’égout passait dans notre rue. Au départ, cela n’a rien changé pour nous, nous voulions pouvoir mettre en place notre système de phytoépuration et le fait qu’une solution « plus simple » passe dans notre rue n’allait pas modifier nos plans. Le problème, c’est qu’en se renseignant un peu, nous nous sommes aperçu que nous avions l’obligation de nous raccorder au tout à l’égout.

L’obligation du tout à l’égout

Sur le principe on comprend bien pourquoi : être raccordé au système d’assainissement collectif permet d’être certains que les eaux usées sont traitées correctement et qu’elles ne sont pas rejetées n’importe comment dans la nature, ce qui serait une catastrophe. Donc historiquement, c’est assez logique qu’on oblige les gens à se raccorder plutôt que de les laisser déverser leurs eaux sales dans la nature. Le problème, c’est qu’il existe maintenant des solutions efficaces. Je ne sais pas ce qu’il en est de la fosse septique et des stations de microépuration, mais pour la phytoépuration, c’est bien plus écologique que les assainissements collectifs. Et la SPANC (Service Public d’Assainissement Non Collectif) dispose de nombreux agents chargés de vérifier régulièrement le bon fonctionnement des systèmes d’assainissement autonome. Donc pas d’inquiétude que le système soit laissé et l’abandon et qu’il rejette de mauvaises choses dans la nature au bout d’un certain temps, tout est prévu pour que ça soit contrôlé régulièrement (d’ailleurs ce n’est pas gratuit !).

Naïfs, nous avons donc pensé qu’il serait assez facile en expliquant notre projet et notre démarche de passer outre cette obligation de raccordement au tout à l’égout. Malheureusement après plusieurs coups de téléphone, nous avons compris que ça serait une longue bataille pour une victoire qui était plus qu’hypothétique. Nos différents interlocuteurs étaient toujours surpris de notre souhait d’avoir notre propre système d’assainissement plutôt que d’utiliser celui de la collectivité. Et bien que certains ont été très réceptifs à l’aspect écologique de notre démarche, la loi, c’est la loi et ce ne sont pas deux hippies rêvant d’autonomie qui allaient la modifier en quelques appels téléphoniques.

phytoépuration assainissement individuel

En fait, nous avions trouvé une faille potentielle. L’obligation de raccordement peut être évitée si le raccordement est considéré comme « trop coûteux ». C’est le maire (la maire dans notre cas) de la ville qui peut donner cette dérogation. Alors nous avons envisagé d’aller la voir en essayant de la convaincre de nous accorder une dérogation. Mais même avec son accord, nous n’étions pas à l’abri d’un changement de maire qui change aussi d’avis, d’un futur changement de loi qui nous obligerait quand même à nous raccorder un jour ou d’un voisin avocat, s’ennuyant un peu le weekend, qui ne comprend pas pourquoi ont a eu la dérogation.

Quand la loi nous oblige à ne pas être écolo

Finalement nous avons abandonné l’idée d’outrepasser le raccordement obligatoire, car nous n’avons aucune envie de passer du temps à nous battre, certainement pour rien, et de prendre le risque d’avoir de longs ennuis avec la justice.

Et surtout, toute cette « bataille » nous prendrait du temps et il fallait qu’on se débrouille pour avoir l’autorisation avant la demande de permis de construire puisqu’en cas d’assainissement non collectif, il faut impérativement joindre au dossier de permis de construire une attestation de conformité de son projet d’installation d’assainissement non collectif, délivré par la SPANC.

Notre achat du terrain étant soumis à l’acceptation du permis de construire, cela revenait simplement à perdre plusieurs mois pour espérer peut-être avoir un accord favorable pour notre système de phytoépuration sans même être certains que notre permis de construire serait accepté.

Déjà que la phytoépuration est bien moins habituelle qu’une fosse septique ou une microstation d’épuration (donc certainement plus de boulot pour avoir l’accord de la SPANC), il y avait encore un autre obstacle : nous voulions autoconstruire nous-mêmes le système de phytoépuration. Nous, deux petits jeunes sans aucune expérience sur la question (je les entends rigoler d’ici…). Bref nous ne voulions pas perdre du temps et de l’énergie en n’étant même pas certains qu’on ferait notre projet sur ce terrain.

phytoépuration interdit d'être écolo

Nous avons donc fait le choix de nous raccorder à l’assainissement collectif et puis nous verrons plus tard… Il sera toujours possible plus tard d’étudier plus en profondeur la question, de prendre le temps de se renseigner et peut-être que de futures lois permettront de choisir de quitter le réseau collectif pour un assainissement individuel écologique.

Quoi qu’il en soit, c’est quand même très triste (et frustrant) de constater que notre société soit si lente à s’adapter aux nouveaux enjeux écologiques et l’administration si réticente à toutes nouvelles idées, même celles qui présentent un intérêt pour la planète 🙁